La partie occidentale des îles Chausey reste la plus sauvage, la plus difficile d’accès, la plus exposée aux tempêtes. Mieux vaut, plutôt que d’engager son voilier dans ce dédale minéral, explorer le coin à petite vitesse, en annexe, un jour de beau temps, avec le soleil dans le dos – et un moteur au-dessus de tout soupçon. Ce fouillis inextricable de roches, de plateaux caillouteux, de chenaux tortueux, d’îlots couvrant au flot, de pointillés d’écueils, est par ailleurs dénué de tout balisage. Les pratiques de l’archipel vont y pêcher le bouquet, le bar, le surmulet, le congre et les crabes, empruntant l’un des nombreux goulets mal pavés repérés par des générations de pêcheurs : passage du Tout ou Rien, chenal de la Houssaie, chenal de la Pierre aux Vras, chenal de Baude, passage des Meulettes, sac à l’Aviron… C’est aussi dans ce paysage lunaire qu’aux grandes marées basses, des hordes de pêcheurs à pied descendent de la Grand-Grève pour aller traquer bouquets, praires, palourdes, tourteaux, étrilles et homards.
Ici, les grandes îles toujours découvertes se comptent sur les cinq doigts de la main : le Chapeau, la Massue, la Meule, la Houssaie et l’île aux Oiseaux. Celle-ci compte une maisonnée de carrier en ruines, mais dont certains murs sont toujours debout, flanquée d’un petit puits couvert d’une belle maçonnerie semi-circulaire, hélas endommagée voici quelques années par des touristes peu scrupuleux. Les roches de l’Ouest portent en tout cas des noms évocateurs : la Déchirée, la Pointue, les Cavales… A noter qu’aux grandes marées basses, la chaudière d’un remorqueur à vapeur est toujours visible sur la face Nord-Est de la Déchirée.