COMMUNIQUÉ DE PRESSE (LUNDI 8 AVRIL 2002)
Chausey en danger !
Barres à mine, crics de voiture et motoculteur… La grande marée (coefficient 118), qui a eu lieu pendant le week-end de Pâques, a vu les pêcheurs amateurs rivaliser d’insouciance et d’irresponsabilité pour tenter d’arracher à l’archipel de Chausey la moindre de ses ressources.
Plus d’un millier de personnes, venues du continent par les liaisons régulières, mais aussi à bord de centaines de bateaux à moteur, ont littéralement ratissé et retourné l’archipel chausiais, certaines utilisant des barres à mine ou des crics de voiture pour soulever les rochers afin d’y arracher les crustacés. On a même vu, sur un banc de sable situé à l’est de Chausey, un motoculteur être débarqué d’un bateau afin de labourer le sol et d’en extraire plus facilement les coquillages. Par ailleurs, plus d’une centaine de pêcheurs d’un jour ont, au mépris de la législation en vigueur, largement pillé la réserve naturelle du Sound de Chausey, ce que l’on peut d’ailleurs vérifier sur les images d’une émission diffusée sur TF1 le lundi de Pâques.
Rappelons que cette réserve a été créée par les pêcheurs professionnels eux-mêmes, dans le but de garantir une zone de reproduction et de protection des espèces.
À l’heure où l’on parle beaucoup de Chausey et de son projet de classement Natura 2000, une telle situation ne peut que renforcer les Chausiais dans leur volonté, non de vouloir transformer l’archipel en sanctuaire, mais de préserver son intégrité et son avenir : défendre les professionnels qui y exercent leur activité (pêche, palourdes, huîtres, moules…) et protéger les espaces sauvages et naturels pour tous ceux qui aiment les fréquenter. Ceci s’accompagne de certaines règles !
L’Association des Chausiais, forte de plus de 180 adhérents, soit la quasi-totalité des habitants de l’île (pêcheurs, commerçants, résidents), démontre chaque jour sa maturité et son réalisme.
Participant dans un esprit constructif à tous les débats qui concernent l’archipel, les Chausiais sont évidemment conscients de son caractère exceptionnel et fragile. Ils sont aussi particulièrement bien placés pour évoquer son avenir, puisqu’ils y habitent tout ou partie de l’année depuis plusieurs générations.
Les îliens n’ont pas attendu Natura 2000 pour prendre des mesures de protection de la nature, mais aussi pour mieux accueillir les visiteurs : création d’une réserve de pêche dans le Sound au début des années 60, création d’une réserve de chasse dès 1968, demande de classement du site dès 1976, convention tripartite entre les propriétaires, les ornithologues et l’Office de la chasse pour suivre les colonies d’oiseaux en 1999, création de gîtes par la Ville et les propriétaires de l’île pour accueillir les amoureux de Chausey, modernisation de l’équipement hôtelier et réouverture de l’épicerie.
Chausey est aussi un quartier de Granville : l’île a son bureau de vote et un des derniers phares encore habités. Les Chausiais ont toujours pratiqué le dialogue avec les autorités, locales ou départementales. Ils ont su toujours prendre leur destin en main, et s’opposer en son temps au projet de Parc national. Ils sauront défendre l’avenir de l’archipel et de ses habitants.
Pour les îliens, le classement de Chausey au titre de Natura 2000 est d’abord une opportunité pour que soient enfin traités efficacement les problèmes d’un site que chacun s’accorde à trouver exceptionnel – et que certains s’accordent à détruire.